jeudi 26 avril 2012

TEACH US TO OUTGROW OUR MADNESS : UNE DÉROUTANTE VISION DE LA FEMININITÉ.



La saison 2011-2012 de La Rose des Vents s’est dès le début placé sous le signe de la subversion, et ce spectacle, qui mêle à la fois danse et théâtre sous la direction de la chorégraphe Erna Omarsdottir n’y échappe pas.

Sur une large scène toute enfumée et vide de décors, qui n’est pas sans rappeler les inquiétantes forêts scandinaves, des entités monstrueuses, tout droit sorties de l’univers de Lovecraft, se trainent péniblement, handicapées par un corps presque humain où les mains sont une deuxième paire de pieds quand celui-ci tout entier n’est pas manipulé par un marionnettiste dément. Après une danse entravée, les monstres se muent douloureusement en femmes. Sitôt fait, elles se mettent en branle pour entrer en transe dans une danse païenne, emprunte de terreur et de supplication. La frénésie ainsi lancée ne se suspend qu’à de rares moments dans le spectacle. Elle assure une atmosphère lugubre et hypnotique appuyée par des nappes successives de synthétiseurs glacials.

Ces cinq femmes, inséparables sœurs, évoluent entre rites dédiés à la beauté et l’exercice de cette beauté même. C’est la rage, la puissance et l’énergie destructrice qui émanent d’elles, maintenant dotées de tous les atouts pour exercer leur ascendance sur tout ce qui les entoure. A ce titre elles n’hésitent pas à nous interpeller, à nous menacer, ou à nous inviter dans leur course infernale. Ces femmes, tantôt infantilisées tantôt animales, provoquent en pervertissant les codes de la féminité. Les cheveux en deviennent le symbole, coiffés dans des postures contemplatives ou malmenés par des "headbangs" mécaniques – soit une danse relative à la musique Heavy Metal consistant à agiter la tête en rythme avec une musique violente – ils font l’étalage débauché d’un culte obsessionnel de la beauté.

Ce spectacle n’est pas que tragique, il est surtout pétri de dérision et de grotesque comme l’explicite une fin insoupçonnée. Entre effroi et fascination, ces femmes unies mettent à mal au fil du spectacle les différentes pellicules de la féminité. Nous émergeons à regret de ce voyage, dépaysés et déroutés par la puissance solaire qu’elles dégagent.

Claire Cacheux, AS1.

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