lundi 28 février 2011

« Preparatio Mortis », une chorégraphie de la vie et de la mort.

Noir. Je perçois les rideaux qui s’ouvrent, mais impossible de voir la scène. Une puissante musique d’orgue à l’aspect religieux commence et sera jouée tout au long du spectacle. J’apprendrai plus tard qu’elle a été composée par le compositeur et directeur d’opéra Bernard Foccroulle. Voilà plus d’une minute que rien ne bouge et je commence à sentir un parfum très floral. Celui de ma voisine ? Je ne sais pas. Un projecteur s’allume enfin, nous laissant apercevoir un autel entièrement recouvert par des fleurs. Voilà donc d’où vient ce parfum. Mais il ne se passe toujours rien, on n’entend que la musique. Puis, l’autel bouge, respire. Très lentement, un bras en sort, puis le corps entier d’une femme en sous vêtements noirs. La lumière chaleureuse éclaire le reste de la scène. Ce n’était pas seulement l’autel, mais tout le plateau qui était recouvert de fleurs. La femme, Annabelle Chambon, parvient enfin à se lever. Ses mouvements sont très saccadés, elle semble en transe. C’est une chorégraphie certes, mais est-ce de la danse ? Elle joue avec les fleurs, les écrase, les chevauche, les saccage ou se fouette avec.

Voilà donc la première partie de ce tout dernier spectacle de Jan Fabre, artiste aux multiples facettes, présenté à l’ouverture du Festival NEXT au théâtre de la Rose des Vents. C’est une œuvre qui trouve son origine en 2005, au Festival d’Avignon.

Pour cette « préparation à la mort », on a plutôt pour l’instant l’impression d’une célébration de la vie. Une évocation assez évidente de l’érotisme et du péché. C’est peut être à ceci que se résume notre vie, aussi éphémère que ces pauvres fleurs.

Si la première partie de ce spectacle est celle de la vie, la seconde représente indéniablement la mort. Après un nouveau noir, la soliste se retrouve enfermée dans l’autel, que l’on voit maintenant comme un cercueil de plexiglas. La lumière n’est plus aussi chaleureuse que tout à l’heure, et vient à présent de la prison de verre elle-même, tout comme une grande quantité de vapeur d’eau. A présent, la femme est entièrement nue, bien que la buée nous empêche de la voir très clairement. Une date est gravée à l’arrière du cercueil. J’apprendrai après documentation que c’est celle de la naissance d’Annabelle Chambon. En attendant, voici de magnifiques papillons bleus que je découvre en sa compagnie qui symbolisent l’âme qui quitte le corps. Grâce à la buée, elle se met à dessiner des sexes sur le verre. Ses cris sont inaudibles et elle finit par s’éteindre. L’érotisme et la mort, Eros et Thanatos, sont décidément indissociables.

Il est difficile de parfaitement décrire ce spectacle, il faut le « vivre », tant il est puissant alors que si peu de choses se passent, ou si lentement. Le parfum comme la musique nous enivrent et nous permettent ainsi de mieux saisir la transe de la danseuse. Une œuvre belle et dérangeante à la fois. Avis aux amateurs.

Loïc Wemmeersche, AS3

" Be your self "

"Be your self" est un spectacle de danse contemporaine réalisé par Garry Stewart, mettant en scène une dizaine de danseurs et une comédienne qui développe tout au long de la représentation le thème de l'identité et ce qui la fonde. Le titre est lui même évocateur du spectacle qui nous attend.

De nombreuses choses sont réunis et travaillées dans ce spectacle, afin de toucher le spectateur et de faire en sorte qu'il se pose la question : « Comment notre corps agit, réagit, face aux différentes émotions et épisodes de nos vies ? ». Les danseurs évoluent sur la scène, cherchent a dépasser les limites de leurs corps, exprimant l'amour, la naissance, la sexualité, la maladie, la solitude ou encore différents ressentis telles que la colère ou la jalousie. C'est tout leurs corps qui dansent, leurs visages dansent aussi. A travers tout cela, on se questionne sur : qu'est qu'un être humain, un robot, une machine ou un animal ?
Ce spectacle n'est pas banale, ce n'est pas une simple représentation de danse, c'est beaucoup plus spectaculaire : il y a des décors, de la musique, de la vidéo, des jeux de lumière et des costumes. Ce mélange de différents médiums nous captive, malgrés quelques répétitions et un début assez violent pour une fin beaucoup plus calme et lente.
Le metteur en scène se sert de différents arts pour poser des questionnement: la musique tenait une place particulière, tout d'abord parce que le spectacle était de la danse mais surtout parce qu'elle était forte, intense, avec des bruitages notamment électrique, ce qui peut ramener a la question de l'homme machine. Durant le spectacle, il y a une métamorphose des costumes : des jupes blanches deviennent ensuite des image imprimés de leurs jambes, évoquant l'ambiguité entre l'homme et la femme et la question de l'identité. Des masques sont portés a l'envers, montrant une différence ou un mauvais fonctionnement chez l'individu. L'expression des choses est faite grâce a un corps et non un visage. La question de la domination et de la soumission sont présentes dans l'œuvre : des danseurs prenaient plus de place et d'importance que d'autres, évoquant les réalités de la vie.

L'ensemble de la représentation peut nous sembler excessive et par moment dificille a suivre, notamment lors des prises de parole en anglais de la comédienne. Cependant l'univers dans sa globalité était futuriste, étonnant et oppressant, développant un coté psychologique et biologique, qui nous laisse aprécier l'oeuvre.

Célia Izard
AS1

dimanche 27 février 2011

Chroniques de vie selon Jan Fabre

Pour cette année 2010, le Next Festival s'offre une belle tête d'affiche en la personne de Jan Fabre. L'artiste aux milles facettes nous propose la suite et fin d'un travail débuté lors du Festival d'Avignon en 2005 alors que la performance ne durait que quinze minutes.


Fabre nous propose ici un voyage initiatique, de la naissance à la mort d'Annabelle Chambon, l'excellente danseuse. Il nous propose une relecture de la vie qui tend à désacraliser la mort. Elle est en effet célébrée, comme une non-fin de vie. « La mort nous amène à porter un autre regard sur la vie, un regard plus intense, plus complet » disait-il à propos de Preparatio Mortis.


Le voyage commence sur un long noir (très long pour certains) accompagné d'une musique quasi religieuse qui dressera les poils de chacun. Une fois les oreilles habituées à ce son, c'est au tour du nez d'entrer en action. Une odeur de fleurs fraiches nous parvient doucement, toujours dans le noir. Arrive enfin la lumière, chaude, nous présentant un plateau couvert de fleur et au centre, sorte d'autel qui respire.


On réalise après quelques minutes que cet autel est habité par un corps mouvant. Petit à petit, des membres sortent de ces fleurs. On découvre alors un corps de femme, qui incarnerait la vie. Annabelle Chambon est la vie. Elle vit avec les fleurs, les possède, les entrelace.


La danse n'est pas danse. Elle est expression. Les mouvements sont saccadés, toujours sur fond d'orgue. L'ambiance est lourde, le spectateur mal à l'aise face à ce voyeurisme. On assiste en fait à la naissance de la danseuse, l'autel devient utérus. Après la naissance vient la mort. Deuxième partie du spectacle, la danseuse est nue, enfermée dans un cercueil transparent, entourée de papillons. Elle hurle, dessine sur les parois du cercueil en plexiglas, et fini par s'éteindre.


Jan Fabre signe un coup de maître avec ce solo. L'émotion est à son comble des premières minutes jusqu'à aux dernières. On vit avec elle, on meurt avec elle. Il réussi une fois de plus à nous placer dans une situation inconfortable, mais avec le temps, c'est peut être finalement ce que cherche le spectateur devant une œuvre de l'artiste.


Célia Cadran, AS3


"Preparatio Mortis" ou quand la mort frôle la sensualité

Sous une atmosphère puissante de mysticisme et de magie, des sensations procurées par la musique de Bernard Foccroulle et l’odeur persistante des fleurs, nous entrons, dès les premières minutes – et dans le noir - dans une autre dimension. Une dimension où les fleurs ont le pouvoir d’évoquer les choses les plus brutales, des fleurs qui, au delà de leur beauté visible, peuvent devenir de véritables armes.

La danseuse est une autre Blanche Neige, allongée sur un cercueil gravé de sa date de naissance - un autel ou un lit mortuaire peut être - qui revit, non grâce au pouvoir d’un baiser princier, mais sous la chaleur d’un rayon de lumière. Elle éclot. Jan Fabre utilise ici, sans équivoque, ce paradoxe dont les fleurs sont porteuses. Celles qu’on offre à un anniversaire, pour prouver son amour, à la future maman pour fêter la vie. Ou sur les tombes que l’on visite à la Toussaint, en y déposant les fleurs pour affirmer ou rappeler encore et toujours la précarité de la vie. Ces fleurs qui vont évoluer, faner et dont le prétendu « recueil » n’est qu’un prétexte pour venir changer les pots de fleurs fanées. Les fleurs utilisées par le metteur en scène sont le mal. Autant de couronne mortuaire, que de fouets ou de jouets érotiques ; de sentiments forts et brutaux que sont capables d’interpréter les fleurs de Jan Fabre. La danseuse passe de la vie à trépas le temps d’un spectacle, foule les fleurs qui parsèment le sol, se blesse, lutte, courre, joue,… Elle vie ! Ces symboles éphémères sont autant de synonymes à la douleur ressentie par le personnage qu’à son bonheur. Ce spectacle vous bouleverse. Oui. Pour ceux qui y sont sensibles, malgré la lassitude – ou grâce à celle-ci - il vous fera réfléchir sur la précarité de votre vie. La lumière s’éteint, les spectateurs sont plongés une seconde fois dans le noir complet. Nous parlions de « recueil », il est évidemment question de ceci dans ces moments étranges de tensions soupesés par la musique et l’obscurité. Il faut fermer les yeux, respirer profondément et se laisser bercer. Puis le rideau s’ouvre à une vision mystique, sensuelle et morbide : la danseuse enfermée dans son propre cercueil, en tenue d’Eve. Le tableau et la mise en scène sont un régal pour les yeux. A l’intérieur de cette cage transparente, Eve semble étrangement sereine, apaisée. Autour d’elle, de seconds symboles éphémères bleutés volent et tentent de s’échapper de cette prison. Ce sont des papillons. Son âme veut s’échapper, s’extraire de son corps tandis qu’elle dessine grossièrement sur la paroi du cercueil, face au public, et grâce à la condensation de l’air, les attributs des deux sexes. Ainsi, dans un même lieu, très étroit, se confrontent alors l’amour, la mort et la vie.

Jan Fabre, dans ce spectacle, utilise un humour noir et subtil. Son spectacle est morbide, certes. Mais la mise en scène est aguicheuse, sensuelle et permet de redorer l’image de l’Ange de la Mort. L’accoutumé revenant n’est plus cette créature horrible, décrépite, vêtue d’une longue cape noire et armée d’une faux dangereuse et aiguisée. Non. Pour le spectacle de Jan Fabre, Eros et Thanatos - les dieux de l’amour et de la mort - se sont unis. L’Ange de la mort est un être sensuel et dangereux, qui tient dans ses mains un bouquet mortel de fleurs colorées qu’il déposera sur votre tombe.

Soyez au rendez vous, la mort vous attend !

En ouverture de l’édition 2010 du Festival Next à Villeneuve d’Ascq, le très controversé Jan Fabre nous invite à découvrir son nouveau solo de danse, Preparatio Mortis. Artiste polymorphe, on le connaît dessinateur, sculpteur, Jan Fabre est avant tout metteur en scène et chorégraphe. Expérimenté lors du Festival d’Avignon en 2005, alors que le metteur en scène belge est l’artiste associé au festival, Preparatio Mortis est un hommage à la vie, pour ne pas citer l’œuvre de Jules Supervielle.

Le spectateur n’est pas encore confortablement installé que son sens olfactif se met en émoi, une odeur de fleurs fraichement coupées parcoure la salle, qui va très vite s’avérer éprouvante pour les narines. Une fois assis et toujours dans le noir le plus complet, c’est cette fois le sens auditif qui est sollicité. En effet, une magnifique composition d’orgue signée Bernard Foccroulle vous prend instantanément aux tripes pendant de longues minutes. Enfin, la lumière nous ouvre les yeux sur une sépulture de fleurs dont va progressivement sortir la jeune Annabelle Chambon, uniquement vêtue de sous-vêtements, telle une résurrection.

La véritable performance commence alors vraiment, la jeune femme reprend petit à petit goût à la vie et s’exprime par la grâce de son corps. Toutefois ses mouvements se font de plus en plus violents et saccadés comme si la mort était inévitable. Une violence annonciatrice de la deuxième partie du spectacle, dans laquelle on retrouve la jeune femme entièrement nue dans une pierre tombale. La chorégraphie continue dans un espace qui étouffe et oppresse peu à peu la jeune femme, alors que ses derniers souffles recouvrent la vitre de buée.

« La mort nous amène à porter un autre regard sur la vie, un regard plus intense, plus complet » explique Jan Fabre. Toutefois, il est question ici d’une prise de conscience de la mort, le chorégraphe belge nous rappelle notre condition en tant que mortel plutôt que de nous montrer combien la vie est précieuse.

Preparatio Mortis laisse perplexe plus qu’il ne donne d’émotions. On ne reste certes pas indifférent devant le talent de cette jeune danseuse mais il ne suffit pas à faire oublier les doutes sur la véritable motivation de Jan Fabre.

Alexis Robaey, AS3

L'essence de l'Homme mis en scène


Le Jeudi 20 Janvier 2011, dans le cadre des études supérieures au sein de la licence : Métiers de la Culture et des Arts à l’Université Catholique de Lille, nous avons assisté à un spectacle de danse contemporaine : « Be Your Self », dont le concepteur et le directeur artistique est Gary Steward. La directrice associée qui est Elizabeth Old. La chorégraphie est dirigée par Gary Steward et les danseurs ADT (L’Australian Dance Theatre).

Ce spectacle représenté au théâtre de la Rose des Vents à Villeneuve d’Ascq, dure 1h10. Durant le spectacle, nous avons l’occasion de découvrir de grandes performances de danse. Des danseurs, qui forme un groupe homogène en mouvements, en étant hétérogène physiquement et morphologiquement. C’est un spectacle qui, pour ceux qui n’ont jamais eu l’occasion d’assister à un spectacle de danse, par exemple, dans mon cas, je n’avais jamais vu de spectacle de danse, et jamais eu l’occasion de voir de la danse contemporaine.

Durant le spectacle, j’étais agréablement surprise, car de par la grande performance des artistes, j’ai quasiment oublié les éléments qui m’ont dérangé. De plus ce spectacle soulève d’importantes questions, tournant autours du corps, de la nature, de la conscience de l’Homme.

A travers l’essence de l’Homme, ses caractéristiques physiques et psychologiques, comment le metteur en scène et les danseurs parviennent-ils à définir les différentes liaisons entre l’Homme et son environnement culturel et naturel ?

L’Homme apparait comme une machine, un assemblage de pièces, éprouvant des émotions et sentiments. Durant le spectacle on passe par de différentes phases, la phase où l’Homme est présenté comme une machine, une association avec la vie urbaine, de par les bruits de fond, qui évoque une ville en travaux. Nous pourrions en soulever un message, comme quoi l’Homme est un être en tout le temps en évolution. D’autre phase où l’Homme apprend à différencier ses différentes émotions, il apparait comme un être fragile, sensible ; comment son corps, son visage réagit avec ces différentes émotions.

De plus par les costumes, on remarque une certaine confusion au début du spectacle, car les danseurs sont tous vêtus de blanc, cependant après dans le spectacle les danseurs reviennent avec des photos de leurs jambes, sur leur costume, ainsi on trouve une identification sexuelle des personnages.

La musique m’a semblée très oppressante, parfois même gênant, j’ai trouvé ça quelque peu dommage, car j’ai trouvé une grande performance des danseurs, cependant à cause de la musique à des moments j’ai eu quelque peu de mal à rester concentrée sur la danse.

Concernant les décors, je les ai trouvé simple, et bien adaptés au sujet du spectacle, car elle donne image simple et vierge de l’Homme et de sa conscience, d’ailleurs un autre moment du spectacle qui m’a marqué c’est celui où les danseurs sortent du mur incliné. Ce fut un passage particulièrement long, mais quand même intéressant.

Le message que j’ai interprété durant cette phase c’est celui de la reproduction de la naissance de l’Homme, car les danseurs sortaient de ce mur, tels des nouveaux nés, qui sortent du ventre de leur mère.

En somme ce spectacle nous montre l’évolution de l’Homme dans les différentes phases de sa vie. Les émotions, la communication, son environnement culturel, naturel, la naissance, la mort. Ce spectacle insiste fortement sur la liaison entre l’esprit, le corps, l’individualité, et surtout la nature.

On remarque aussi, une femme, qui n’est pas une danseuse, qui pendant le spectacle tient un discours, dont nous avons la traduction dans le livret du spectacle. Cette femme pourrait symboliser, d’après moi, la conscience de l’Homme, qui lui dicte comment évoluer selon les différentes situations.

En définitive, j’ai apprécié ce spectacle, de par le message qu’il en a dégagé, de par la performance des danseurs, malgré la musique et j’ai le moins aimé, la scénographie était bien gérée, et donne au spectateur une belle expérience, et lui offre un questionnement sur sa propre essence en sortant de la salle.


Marie Duquesnoy AS1

Une renaissance de l'homme par la danse?


Un soir à la Rose des Vents, endroit que j'affectionne particulièrement pour ses spectacles toujours originaux et décalés, nous , AS1, sommes allés voir "Be your self". En ce sens, je ne fus pas déçue.
"Be your self" est un ballet de danse contemporaine, chorégraphié par Garry stewart, durant un peu moins d'une heure et demie, donc relativement long pour ce genre de spectacle vivant.
Des danseurs arrivent sur scène, habillés en blanc et pourtant tous si différents physiquement. Le son et les lumières m'interpellent, une musique très saccadée, très forte et légèrement oppressante se fera entendre durant la totalité du spectacle, des jeux de lumière souvent très en rythme avec le son, des effets de stroboscope qui ajoutent une touche étrange et presque effrayante.
Effrayant mais aussi intéressant, tout comme le sujet du ballet. Une femme habillée en blanc au visage inexpressif, à la voix très claire, nous fait une description du corps humain tout aussi technique que scientifique. Elle reviendra à plusieurs reprises nous informer sur le corps humain, les sentiments de l'Homme vis-à-vis de lui-même ainsi que de son entourage.
Les danseurs nous offrent ensuite un spectacle techniquement irréprochable où ils jouent avec leur propre corps ainsi que celui des autres et nous montrent aussi les limites du corps humain aussi bien physiques que mentales en se contorsionnant, en sautant, en criant ou riant.
On remarque alors que ces danseurs ont également un jeu d'acteurs très important, leur visage est particulièrement expressif et donne plus de sens au spectacle. Ainsi, des sentiments très variés nous sont montrés tels que le rire, la peur, la colère, la honte, la joie, la tristesse, etc. lorsque l'être humain commence à se connaître et cherche à apprivoiser l'autre. Sont alors représentés l'amour, la haine, l'hétérosexualité et l'homosexualité, les pulsions sexuelles et reviennent la honte, la colère et bien d'autres.
Une fois que les danseurs deviennent un individu à part entière et non simplement un prototype, ils s'habillent alors d'une jupe ornée de leur propre photographie ; puis ils exprimeront d'une façon analogue la maladie, les malformations...
Pourtant, malgré l'idée de départ intéressante, vivante et originale, les chorégraphies finissent par se ressembler et un sentiment d'ennui m'a alors gagnée. En effet, celles-ci toujours techniquement impressionnantes commencent à être répétitives, la dernière mise en scène représentant des membres, des têtes et autres parties du corps, sortant d'un drap, s'éternise en voulant probablement représenter la naissance de l'Homme.
A mon avis, le spectacle aurait gagné à être raccourci afin que le spectateur, frustré plutôt que saturé, souhaite connaître les autres réalisations de ce chorégraphe.
Marine Hossein
AS1

Un voyage des sens signé Jan Fabre

Jan Fabre artiste belge protéiforme nous offre un spectacle sensoriel époustouflant. Nos sens sont en éveil dès le prélude plongeant le spectateur dans l’obscurité la plus profonde, accompagné d’une musique d’orgue transcendante de Bernard Foccroulle. L’olfactif n’est pas laissé pour compte, puisque petit à petit nous sentons la présence en grand nombres de fleurs. Cette odeur imbibe et envahit la salle. Rares sont les artistes qui produisent des « spectacles olfactifs» d’une telle puissance. Et lorsque la lumière revient c’est un tapis de fleurs qui s’étend devant nos yeux.

Les amateurs de Jan Fabre, seront une nouvelle fois déroutés par le metteur en scène belge, qui jouant sur la pulsion de vie et la pulsion de mort fait comme (re)naître la danseuse Annabelle Chambon. Ce tapis de fleurs, coloré, marque de lent mouvement de respiration, puis laisse apparaître une main, un bras et enfin un corps entier qui vient se mouvoir sur scène. C’est alors que la danseuse éprouve de nouveau ou découvre, pour la première fois, les premières expériences de la vie. En occupant l’espace scénique en entier elle nous offre une performance étonnante.

L’obscurité ressurgit toujours accompagnée d’une musique d’orgue pour une seconde fois, quelques applaudissements se font entendre, cependant ce n’est pas la fin du spectacle, le plus beau reste à venir. La lumière revient après ces quelques minutes intenses pour le spectateur privé de la vue. Le corps de la danseuse est enfermé dans une boîte, un cercueil, où elle continue de se mouvoir. Un moment de grâce, comme ceux que recherchait tant Kleist dans son théâtre de marionnette. Des papillons viennent voler autour d’elle, son esprit s’échappe peu à peu, pour enfin laisser ce corps sans vie.

Tel un Roméo Castellucci, un Pippo Delbono ou un Rodrigo Garcia, Jan Fabre nous offre un voyage des sens, entre la vie et la mort. Pour Delbono qui travailla un temps avec la danseuse Pina Bausch, il faut penser « Un spectacle, comme un rite, une expérience qui court toujours en suspens, une expérience extraordinaire qui nous met en relation avec le mystère. »Tout comme ces metteurs en scène il ne laisse pas le spectateur paisible, il met ses émotions à nu, le fait réfléchir, s’interroger sur la vie, la mort.

Cependant c’est avant tout de danse dont il s’agit et non de théâtre. Jan Fabre sonde par la danse la dimension physique et spirituelle du corps d’Annabelle Chambon. A la sortie, les avis sont partagés sur ce spectacle considéré pour la plupart comme l’une des meilleures réalisations de l’artiste belge. Que l’on aime ou pas, il ne vous laisse pas de marbre.

" Preparatio Mortis " de Jan Fabre.

Deffrennes Kevin AS3

Be Yourself, l’exploration de soi

Présenté à la Rose des vents les 18, 19 et 20 Janvier, Be yourself propose une interrogation sur le "moi" par le biais de la danse. Pour ce spectacle, Garry Stewart - chorégraphe et directeur de l’Australian dance Theater - nous offre une prestation traversée par une multitude de champs artistiques. Danse contemporaine et classique, musique, vidéos, architecture et théâtre s’y mêlent pour une quête du « moi », en soulevant la complexité d’Être. Et cette diversité se retrouve également chez les danseurs : aucun standard n’est mis en avant, chaque morphologie, origine ethnique est respectée, valorisée. Premier signe que le « moi » n’est guère un élément commun, mais bien propre à chacun. Entre rythmes et mouvements, informations scientifiques et expression du visage, tout est mis est œuvre afin d’appréhender sa propre personne. Une exploration des sens qui tente de répondre à une interrogation universelle : Qui suis-je ?

Dans un premier acte, les huit danseurs de l’Australian Dance Theater se prêtent à l’expérience du corps machine. Leurs mouvements sont en effet saccadés, décomposés. On observe une mécanique, rythmée par une musique qui n’est pas sans rappeler une porte qui grince, les bruits d’un moteur de voiture en marche. Et tout passe par cette mécanisation, même les relations humaines n’y échappent pas. On pourrait ainsi croire que La parade amoureuse de l’artiste dadaïste Picabia prend vie sous nos yeux. Ces danseurs et leurs mouvements semblent bien s’inscrire dans la société hautement technologique dont nous sommes contemporains, où production et rentabilité règnent en maître. On relève ainsi une interrogation sous-jacente, quelle place accorder à la forme et à la fonction du corps dans la société actuelle ?

La seconde partie du spectacle propose une approche plus poétique et sensible, moins nerveuse que la précédente. Les émotions sont ici disséquées, notamment grâce au discours d’une comédienne, qui nous apporte de nombreuses informations scientifiques venant expliquer leur déclenchement. Puis les corps se mêlent, dans une gestuelle plus douce, grâce à la mise en place d’un impressionnant mur blanc, dispositif scénique amovible, permettant l’apparition de nouvelles entités inédites. Cela invite à penser que trouver son « moi » passe également par la connaissance et la relation que l’on peut avoir avec autrui.

Be Yourself est avant tout une mise en scène épatante : l’œil est sans cesse sollicité, l’oreille assujettie à nombre de bruits (au point d’en être parfois dérangeant), et la performance des danseurs est la preuve d’une condition physique exceptionnelle. Relevant plus du spectacle que d’une simple prestation, Garry Stewart réussit avec brio son pari dans la recherche du moi et de son expression corporelle. Car il me semble difficile de ressortir de la salle sans se demander, à son tour, "Qui suis-je réellement? ".

Capucine CRÔNE, MCC3

Crédit photo: C. Herzfeld

Corps, accords et désaccords



Dans Be yourself, présenté à La Rose Des Vents les 18, 19 et 20 janvier dernier, le chorégraphe Australien Garry Stewart explore le corps humain et le « moi » pour une expérience multidimensionnelle.

Car la grande force de ce spectacle est de jouer sur la diversité, tout d’abord des registres scéniques, Be Yourself mélange à la fois danse, musique, mots, vidéo etc. ; des danseurs aux ethnicités et morphologies différentes, on remarquera les détails attachés à chaque costume pour les rendre singuliers. Mais également dans sa finalité : en effet, l’œuvre s’applique à décrypter le corps humain comme source du « moi » en procédant par actes.

Dans un premier temps, le corps se fait machine, avec ses rouages et sa mécanique à maîtriser, il faut alors en tester les capacités et les limites. Sur scène, les danseurs deviennent automates, une impression d’autant plus renforcé par les bruits de machinerie qui viennent ponctuer l’univers sonore, les corps sont désarticulés, les mouvements saccadés, décomposés pour en observer les moindres détails. Reste une impression de chaos et de confusion exacerbée par des éclairages quasi hallucinogènes et des musiques étouffantes. Puis, de ces corps naissent les émotions : la joie, la peur ou la colère et les pulsions amoureuses, le rejet… autant de chamboulements nécessaires pour composer des personnalités uniques et aboutir à une harmonie entre tous ces individus et toutes ces individualités et ce par un final plus poétique et mélodieux où les mouvements se font fluides et les corps tous reliés entre eux par des jeux de lumière et de vidéo.

L’attrait principal reste la performance très impressionnante : les danseurs enchaînent acrobaties, mimes, chorégraphies alliant break dance, classique et postures spectaculaires à une cadence effrénée. Le saisissement est d’autant plus grand que la Grand Salle de La Rose des Vents permet aux spectateurs, par la proximité entre la scène et le public, de voir de façon très nette les visages et la concentration des ces athlètes dans les moindres détails. Très vite les danseurs se font comédiens, les comédiens sont substitués à la vidéo… Et ce dans une maîtrise totale, il n’y a pas un seul temps mort et jamais l’on ne s’éloigne du sujet. Chaque tableau parvient à nous surprendre cependant ceux-ci s’éternisent et finissent par lasser. L’expérience reste assez éprouvante notamment par des stroboscopes à outrance et des effets sonores assourdissants et très percutants. A plusieurs reprises, les basses hypra saturées parcourent même les corps des spectateurs, la perception du spectacle est donc elle aussi plurielle.

Maud Fournier
AS1

samedi 26 février 2011

Corps à Corps

Spectacle "Be your self" de Garry Stewart

Qu'est-ce qu'un être humain ? C'est à cette question que tente de répondre le spectacle "Be your self" en adoptant une démarche quasi scientifique.
Cette chorégraphie opère donc comme une véritable dissection du corps et de l'esprit et offre un résultat plutôt intéressant bien qu'assez déroutant.
Garry Stewart cherche ici à mettre en avant la question de l'identité ainsi que le dualisme groupe/individu. Il y parvient avec brio en cultivant les différences entre les danseurs de l'Australian Dance Theatre et sublimant leurs spécificités, ne cherchant pas, par exemple, à les masquer derrière des "uniformes" qui tiennent lieu de costumes, comme c'est trop souvent le cas dans les ballets classiques notamment. On parvient ainsi parfaitement à identifier chaque individu et ses caractéristiques propres tout en percevant l'unité du groupe.
La pluridisciplinarité est une autre force du chorégraphe australien et de ce spectacle en particulier. Celui-ci mêle en effet danse, arts visuels ainsi qu'une très grande théâtralité pour un rendu tout à fait cohérent. Bien sûr on ne peux plus aujourd'hui parler ici d'originalité puisque cet aspect est de plus en plus exploité par des metteurs en scène contemporains comme Bob Wilson ou encore Roméo Castellucci. Mais Garry Stewart va plus loin puisque cette diversification se retrouve jusque dans le travail des danseurs formés aussi bien à la danse contemporaine, qu'au classique mais également à l'improvisation ou encore au yoga, le tout leur procurant une dextérité, une précision et une justesse remarquables.

Cependant cette cohérence est ébranlée par différents éléments quelque peu déroutants. Ainsi on assiste à un mélange de poésie et d'agressivité plus ou moins bien dosé. Ce spectacle affiche une forte nervosité parfois violente dans la mise en scène, principalement par les jeux de sons et lumières extrêmement agressifs jusqu'à en devenir lassant. Mais cet aspect est vite contrebalancé par des tableaux d'une grande poésie et esthétiquement très recherchés plongeant au final le spectateur dans une certaine confusion.
D'autre part on peut regretter un traitement trop important du caractère mécanique du corps humain, qui, bien que très juste et intéressant, met de côté son aspect aléatoire et imprévisible. Car l'identité et l'individualité, chères à Garry Stewart, ne résident-t-elles pas justement dans cette contingence ?

Camille NICOLLE
AS1

vendredi 25 février 2011

à la recherche de son "self"

Le nouveau spectacle de Gary Stewart et de sa troupe de danse l’Australian Dance Theatre (ADT), la plus grande de toute l’Australie, s’intitule sobrement « Be yourself ». Il est divisé en cinq discours, tel le théâtre classique et ses cinq actes. Chacun d’entre eux est prononcé par une comédienne, et s’articule autour de la notion du « moi ». Celle-ci est traversée par des aspects psychologiques, neurologiques, musculaires ou purement factuels comme dans le discours 2 « j’utilise 72 muscles pour parler / Je tousse à 96 kilomètres à l’heure / J’éternue à 160 kilomètres par heure / Je cligne des yeux 6 205 000 fois par an / etc. ». Ces discours sont dits avec une telle rapidité qu’il nous est difficile de suivre ce que cela raconte, d’autant que lire une feuille de traduction pendant un spectacle n’est pas chose facile. Mais au final qu’importe, notre œil reste très attentif à l’impressionnante chorégraphie du spectacle. A l’heure où la danse contemporaine se limite dans la question du mouvement et utilise de plus en plus des procédés tels que la vidéo ou le théâtre (comme dans le spectacle Entracte de Josef Nadj où le mouvement de danse est peu présent alors que le geste mimé l’est), Be Yourself se centre surtout sur cette question. C’est un mouvement en décomposition qu’on nous montre, aussi bien interne (battements du cœur) qu’externe (expressions faciales, décomposition d’une certaine marche). Un mouvement qui doit se chauffer, comme un moteur, avant de se mettre définitivement en marche vers une quête d’identité. Cette question de l’identité est mise en avant par le corps, qui nous définit chacun physiologiquement, et s’accélère au rythme des discours. Il faut alors procéder par étape : la question du soi commence par le travail du mouvement musculaire (discours 1) et se termine par la perception de soi et de son corps dans le monde qui nous entoure (discours 5) en passant par le stade émotionnel par exemple (discours 3). C’est un travail nécessaire à la singularisation de chacun, et du corps de chacun mais qui nous questionne alors : Qui suis-je donc ? De simples muscles ou neurones ? Une entité psychologique ? Un corps ?
Même si le spectacle ne répond pas concrètement à la question du soi, il en fait une recherche et le jeu avec la scénographie, qui constitue la dernière partie du spectacle, en vaut vraiment la chandelle. Il nous montre des membres du corps (bras, jambes, têtes) passés à travers des draps élastiques (sur une plinthe inclinée, constituant le fond de scène) décomposant le mouvement, ou recomposant une partie du corps (grâce à la projection vidéo de la cage thoracique d’un corps par exemple). Ces mouvements des corps gracieux ont une certaine beauté à laquelle on ne peut être insensible.
Le spectacle est donc un enchainement spectaculaire qui nécessite bien des capacités, auxquelles Gary Stewart entraine ses danseurs, dans le but d’une maitrise total de son corps : Arts martiaux, gym, danse (classique et contemporaine), improvisation, break dance, et yoga. Cette maitrise leurs permet alors d’inventer un nouveau vocabulaire de la danse et de poser des questions. Cette quête d’identité est mise en rythme sur une musique forte et saccadée, accompagnée d’une lumière très blanche, presque aveuglante qui fait de Be Yourself une expérience aussi bien visuelle qu’auditive – et qui à mon sens vaut la peine d’être vécue. Ce spectacle peut néanmoins être difficile à supporter pendant 1H10, notamment pour les personnes épileptiques ce qui limite son accessibilité à un plus large public.

Sara Dufossé
AS3