lundi 30 avril 2012


Prometheus Landscape II

de Jan Fabre



Le dernier spectacle de Jan Fabre, représenté à la Rose des vents il y a quelque temps, est un véritable choc esthétique et physique. La pièce s’inspire du mythe de Prométhée, ce titan condamné à être enchaîné sur un rocher où un aigle vient lui dévorer le foie pour l’éternité tout cela pour avoir donné le feu aux hommes.
A peine, le spectateur installé le spectacle semble déjà commencer quand il observe sur la scène un des comédiens ligotés sur une chaise le regard vide. Chauve, enrobé et nu, il met en contexte ce qui va suivre. Deux autres personnages, positionnés des deux cotés de la scène devant un rideau noir, commencent le spectacle avec une longue énumération de personnalités de l’histoire que l’on a nommé comme héros. 

Cette scène, peut être un peu trop longue, lasse le spectateur et commence à faire monter une certaine tension face à une comédienne calme confrontée à un autre de plus en plus nerveux. Une fois le rideau ouvert, on découvre un décor impressionnant avec un personnage ligoté par les mains et les pieds et étiré de chaque extrémité le suspendant dans les airs, son corps formant un « X ». On observe derrière lui une projection magnifique d’un soleil jaune/orange vu de l’espace qui rappel la puissance du feu et son énergie. Une mise en scène qui personnellement retient l’attention tant la beauté et la torture physique semble se mélanger à merveille. Servi comme une sorte d’offrande, ce Prométhée suspendu reste silencieux et immobile durant une grande partie du spectacle, condamné à observer les humains qui dansent, s’accouplent, se moquent ou s’entretuent autour de lui rappelant son échec d’offrir à l’homme un pouvoir qu’il ne contrôle pas.

Habilement mis en scène Jan Fabre pousse le spectateur plus loin qu’un mal être inévitable en lui montrant des performances qui use le corps, montré à la fois dans toute sa beauté mais aussi avec tout ses défauts rappelant d’une certaine manière la vanité de l’homme à se prendre pour un dieu. Fabre n’hésite pas à montrer la nature sauvage de l’homme, ce qu’il construit et ce qu’il détruit et cela s’exprime par une dualité entre chaud et froid tant le soleil d’une couleur jaune/rouge laisse sa place à la lune froide et sans vie. 

La présence des extincteurs qui propulse des jets de CO2 sur les personnages en dit énormément : L’homme aurait-il besoin de se protéger du feu s’il en avait la maîtrise ?  
Ce spectacle intense, impressionnant, choquant, écœurant et déstabilisant, ne laisse à aucun moment le spectateur respirer et le pousse dans ses limites quitte à le faire sortir de la salle. Et la force de Jan Fabre réside dans le fait que son message est tellement fort qu’il n’apparait qu’après coup une fois la performance achevée.
En abordant le mythe de Prométhée, le metteur en scène se permet une réflexion sur l’homme et sa recherche d’un leader qui peut s’interpréter comme une recherche de lui-même à travers un voyage sans fin qui explore presque les 7 péchés capitaux.
Un spectacle que je recommande, non pas aux amateurs de danse mais plus à ceux en quête d’une recherche esthétique et technique intense entre beauté et torture psychologique avec toute fois un certaine ouverture d’esprit à mettre en place.

Humberto Da Silva AS3

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