Noir. Je perçois les rideaux qui s’ouvrent, mais impossible de voir la scène. Une puissante musique d’orgue à l’aspect religieux commence et sera jouée tout au long du spectacle. J’apprendrai plus tard qu’elle a été composée par le compositeur et directeur d’opéra Bernard Foccroulle. Voilà plus d’une minute que rien ne bouge et je commence à sentir un parfum très floral. Celui de ma voisine ? Je ne sais pas. Un projecteur s’allume enfin, nous laissant apercevoir un autel entièrement recouvert par des fleurs. Voilà donc d’où vient ce parfum. Mais il ne se passe toujours rien, on n’entend que la musique. Puis, l’autel bouge, respire. Très lentement, un bras en sort, puis le corps entier d’une femme en sous vêtements noirs. La lumière chaleureuse éclaire le reste de la scène. Ce n’était pas seulement l’autel, mais tout le plateau qui était recouvert de fleurs. La femme, Annabelle Chambon, parvient enfin à se lever. Ses mouvements sont très saccadés, elle semble en transe. C’est une chorégraphie certes, mais est-ce de la danse ? Elle joue avec les fleurs, les écrase, les chevauche, les saccage ou se fouette avec.
Voilà donc la première partie de ce tout dernier spectacle de Jan Fabre, artiste aux multiples facettes, présenté à l’ouverture du Festival NEXT au théâtre de
Pour cette « préparation à la mort », on a plutôt pour l’instant l’impression d’une célébration de la vie. Une évocation assez évidente de l’érotisme et du péché. C’est peut être à ceci que se résume notre vie, aussi éphémère que ces pauvres fleurs.
Si la première partie de ce spectacle est celle de la vie, la seconde représente indéniablement la mort. Après un nouveau noir, la soliste se retrouve enfermée dans l’autel, que l’on voit maintenant comme un cercueil de plexiglas. La lumière n’est plus aussi chaleureuse que tout à l’heure, et vient à présent de la prison de verre elle-même, tout comme une grande quantité de vapeur d’eau. A présent, la femme est entièrement nue, bien que la buée nous empêche de la voir très clairement. Une date est gravée à l’arrière du cercueil. J’apprendrai après documentation que c’est celle de la naissance d’Annabelle Chambon. En attendant, voici de magnifiques papillons bleus que je découvre en sa compagnie qui symbolisent l’âme qui quitte le corps. Grâce à la buée, elle se met à dessiner des sexes sur le verre. Ses cris sont inaudibles et elle finit par s’éteindre. L’érotisme et la mort, Eros et Thanatos, sont décidément indissociables.
Il est difficile de parfaitement décrire ce spectacle, il faut le « vivre », tant il est puissant alors que si peu de choses se passent, ou si lentement. Le parfum comme la musique nous enivrent et nous permettent ainsi de mieux saisir la transe de la danseuse. Une œuvre belle et dérangeante à la fois. Avis aux amateurs.
Loïc Wemmeersche, AS3
Bonjour,
RépondreSupprimerTrès intéressés par votre critique, nous avons publié cet article sur le site internet du T2G (où le spectacle est joué du 30 nov au 2 décembre 2012).
http://www.theatre2gennevilliers.com/2012-13/fr/programme/502-preparatio-mortis-jan-fabre
Bien à vous,
Juliette Col
juliettecol@tgcdn.com
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