Pascale Marthine Tayou, artiste camerounais, nous propose cette exposition monumentale dans un espace immense aménagé par la Gare Saint Sauveur. Nous y découvrons un foisonnement d’installations, de toutes tailles et de tous horizons, pour la plupart très spectaculaires. L’exposition s’apparente à un véritable parcours, qui occasionne un cheminement entre les œuvres, sans début ni fin, ce qui est assez inédit. On s’y ballade comme on le souhaite, s’attarde sur ce qui nous intéresse ou attire notre regard.
Dans l’ensemble, Pascale Marthine Tayou porte un regard sur la société de consommation, ou de surconsommation. Le motif récurrent est le sac plastique : icône d’une société du jetable, miroir des excès de la vie contemporaine.
Mais c’est aussi une réflexion sur le temps qui passe, sur l’usure, la vie et la vieillesse. Par exemple, Pascale Marthine Tayou se présente lui-même dans deux autoportraits, l’un à côté de l’autre, qu’il a pris à une dizaine d’années d’intervalle.
Il nous invite également à venir découvrir une autre culture, celle de son Afrique natale : " Le Cameroun est ma marque de fabrique déposée, la base où tout a commencé. J'y suis né et j'y ai été éduqué : par mes parents, mes amis et la rue. Je trouve qu'il est important de le montrer dans mon œuvre. Ainsi, tous ceux qui suivent mon travail là-bas savent que tout est possible. " nous dit-il. A mi-chemin entre le Cameroun et l’Europe (il vit à présent à Gand), il redéfinit une culture postcoloniale, faisant part de ses expériences vécues dans son pays d’origine et dans celui où il vit désormais.
L’exposition propose un foisonnement d’œuvres très variées : sculpture (poupées ou marionnettes, troncs suspendus, structures monumentales utilisant toutes sortes de matières), peinture, dessin, photographie, projections (films quasi documentaires du Cameroun projetés dans ou sur des structures improbables, sortes de petites huttes africaines recouvertes d’une neige mousseuse, ici aussi à mi-chemin entre l’Afrique et la Belgique).
On retient certaines œuvres plus que d’autres, comme « Garage Modern », carcasse de voiture qui semble avoir été abandonnée là, que l’artiste a décomposée, démonté toutes ses pièces pour les surexposer ensuite, comme pour révéler un subterfuge. Ou encore l’œuvre « Wall Street », qui consiste en un mur recouvert d’enseignes d’une centaine de compagnies nationales et multinationales du paysage urbain camerounais, et vise à dénoncer l’homogénéisation d’une culture globale.
Cette surabondance nous donne à voir des œuvres qui ne répondent pas à une seule et unique problématique mais explorent de nombreuses choses, parmi lesquelles chacun pourra faire son tri. Entre un cône de cinq mètres de diamètre s’élevant vers le ciel et recouvert de sacs plastique multicolores, et des frigos renfermant des films d’enfants camerounais, on peut ainsi trouver une « roue des insultes », qui invite le spectateur à s’investir puisqu’il doit la tourner, pour tomber sur l’insulte qui lui correspond. C’est ce genre de petit écart insolite qui fait toute la richesse de l’exposition.
Alice Bubbe - AS3
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