The Day empties its images
La route est longue et sinueuse jusqu’à la petite porte qui
marque discrètement l’entrée de l’exposition. On rentre alors dans l’atrium qui
nous mène jusqu’à la seconde porte. Il faut toquer pour qu’on nous ouvre.
La pièce est assez haute de plafond et plongée dans
l’obscurité, on rentre presque à taton en espérant ne rien faire tomber.
Puis, une fois entré, on découvre un visage blanchâtre
émanent du sol juste devant, dégageant une sorte de halo étrange.
Plongée dans l’onirisme ;
le cercle qui
l’entoure est fait d’une sorte de sable très fin et très brillant qui envoie de
petit rayons de lumière éclatants.
La vision floue porte déjà le spectateur à réfléchir sur ce
qu’il voit. Le visage n’est pas immobile, il y a comme une vibration qui tinte
la netteté des traits.
La question se pose alors :
Où suis-je ?
On trouve un petit
feuillet, sur lequel on aperçoit un titre : The Day empties its images.
L’histoire commence, on trouve la page 1 et 6, mais il nous
manque le reste. Nous savons alors que la jeune fille va vivre et mourir.
La seconde image, fixe et nette cette fois, montre une belle
chute d’eau.
Comme un rêve, cette projection : La Pleureuse, est une
porte qui s’ouvre sur l’univers de l’artiste :
Anaïs Boudot nous projette ici sont propre inconscient,
ambiguë, coincé entre rêve et réalité.
Le manifeste d’une problématique ancrée dans la société
d’aujourd’hui : l’échappatoire vers la nature.
Image romantique d’une nature sauvage fantasmée, appuyée par
le retour aux anciens procédés photographiques. Le grain est ici l’instrument
d’une nostalgie qui se ressent dès les premières impressions.
On trouve alors un plan.
Plan de l’exposition, si petite soit-elle, mais aussi plan
artistique.
En effet, la configuration, choisie par la photographe, nous
pousse malgré nous sur un sentier étrange où la logique perd son sens, puisque
nous avons passé la porte des songes.
La série suivante marque la force d’expression de l’artiste.
Comme des fenêtres ouvertes sur un monde inaccessible, on est coupé de l’image
par la puissance du reflet qui nous renvoie notre propre image.
Le monde apparaît alors, à travers cette image personnelle
du spectateur, appelé à suivre la démarche entamée par l’artiste. On a plus le
choix, nous sommes acteurs malgré nous d’une tragédie.
Car oui, l’histoire n’est pas finit :
Les feuillets 2 et 3 sont devant nous. La jeune fille que
nous savons condamnée avance, elle aussi, vers la fin.
Echo lointain des images, distordu par l’âme tourmentée du
poète, l’histoire s’annonce bien sombre, et contraste de loin avec les superbes
paysages qui nous sont proposés.
Les photos sont comme des rêves, aperçus comme à travers un
masque, coupé du temps et de l’homme. Paradis ésotérique, rappelant les grands
tableaux d’Arcadie, nostalgie déjà des classiques, la photographe s’inscrit
alors dans une réflexion sur le monde.
Le médium photographique nous apparaît alors comme une
porte, charnière entre l’ère du numérique et de sa reproductibilité en série,
son flot continu d’images, toujours en mouvement, tourné vers l’avenir ;
et la lenteur du passé, l’application de l’artisan au travail, et la patience
du geste. Césure directe de la première partie, le coté sombre ressort beaucoup
plus, appuyé par le discours romantico-tragique du texte de Lucien Raphmaj.
Nous terminons alors notre voyage par le paroxysme
littéraire, en total contraste avec la tranquillité que dégage la fin de la
série.
Car nous découvrons les feuillerts 4 et 5 qui nous emmène à
travers les grands espaces, près du littoral. Là où se mêle mysticisme et
calme, la photographe imprègne ses photos d’une intemporalité. Comme si le
temps était abolie, la photographie marque le paysage du Beau.
L’image tranquille d’un idéal éternellement sauvage, coupé
du monde bruyant et mécanique des hommes. La seule présence humaine est dans
les textes. Elle va d’ailleurs se plonger tout entier dans ce monde calme. Le
chemin, facile à comprendre, que suis la jeune femme nous mène droit au
suicide.
Oui, elle saute du haut d’un rocher.
Triste image d’une magnificence par le sacrifice (à quoi
bon ?), on ressort avec un goût amer.
Les yeux ont été satisfaits, il reste à travailler la
narration.
MAGNAN Antoine, AS1
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