lundi 22 mars 2010

POSITIF

Mai 1962, Bernard Chardère et quelques uns de ses amis de lycée décident de fonder un magazine pour parler de leur passion : le cinéma. Au programme : un dossier sur la musique dans les films, des articles sur L’Ange Bleu, sur Los Olvidados… Quelques mois après les Cahiers du Cinéma, une nouvelle revue mensuelle dédiée au septième art est née.

Positif accroche l’œil. Ses couvertures sont sobres dans leur mise en page mais les photographies éblouissent par leurs couleurs et leur composition. Cette année, Positif nous a transporté dans un champ de violettes (Bright Star de Jane Campion) au mois de janvier puis au bord de l’eau sous un couché de soleil (Tatarak de Andrezej Wajda) en février. Septembre 2009 était plus rude, une vue depuis la cellule du héros d’Un Prophète. Dommage que cet enchantement visuel ne perdure pas à l’intérieur du magazine. A la perfection de la première image succède un contenu gris et des photos, certes assez nombreuses, mais de plus ou moins bonnes qualités. Le charme s’évapore lentement et laisse place à une centaine de page austères.

Néanmoins il est nécessaire de persévérer car alors on peut être gagner par des articles très forts. Au plaisir visuel succède le plaisir cognitif. Dans la rubrique « Actualité », ce sont trois ou quatre films chaque mois qui sont commentés, critiqués et suivis d’un long entretien avec le réalisateur. Souvent passionnant, les journalistes posent des questions pertinentes aussi bien sur les méthodes de travail que sur le contenu du film. Ces articles sont argumentés et développés si bien qu’ils peuvent nous obliger à revoir notre jugement sur un film. Sortie dépitée de Les regrets de Cédric Kahn, j’ai été sublimé par l’article et l’entretien, je suis retournée voir le film, je l’ai redécouvert et appréciée ! Quelle étrange aventure et quel pouvoir !

A la manière de ces critiques finement menées, les longs dossiers en fin de magazine sont quant à eux passionnant. Ils traitent de sujet aussi divers que Robert Aldrich, le cirque au cinéma ou le bilan d’une décennie cinématographique. A chaque fois, ils sont composés de nombreux articles, critiques, entretiens ce qui les rend particulièrement complets. Les recherches menées ouvrent des voies de réflexion pertinentes et enrichissantes pour les cinéphiles ou professionnels du cinéma.

Un même pouvoir d’attraction dans la rubrique Voix Off qui donne la parole à une personnalité du cinéma. Cette dernière évoque ses souvenirs, ses envies, ses croyances, son approche du cinéma… Delon nous raconte Joseph Losey. Jia Zhangke évoque son parcours jusqu’à la liberté, jusqu’à la réalisation dans un texte sublime qui amène mille et une réflexion sur le cinéma d’aujourd’hui. A la fois intime mais jamais déplacé ces textes nous permettent d’entrapercevoir une autre facette du 7ème art.

Le grand bémol du magazine, en plus de son prix élevé, se nomme « Les films de A à Z ». Il s’agit de critiques succinctes des autres films du mois. Ces critiques semblent dérisoires face aux critiques d’une à plusieurs pages. De plus lorsque le film a déjà été commenté dans un autre numéro lors d’une occasion particulière (Le festival de Cannes par exemple) alors la critique n’est pas republiée un simple chiffre nous indique dans quel numéro de Positif la rechercher. Cela complique la tâche du lecteur.

Ainsi malgré quelques points faibles, c’est un réel investissement intellectuel que de miser sur ce magazine. POSITIF se conserve, se délecte, s’apprivoise mais surtout passionne. Le noir et blanc inquiétant, appuyant le sérieux du magazine. Mais le cinéma nous a prouvé que la couleur n’altérait en rien la qualité d’un bon film. Il en est de même pour les magazines, POSITIF donnez nous plus de couleur !
AS3, Sarah VIDAL

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