Et si Dunkerque était née en 2009 dans une salle du LAAC et ne mesurait que la taille d’une longue toile horizontale ? Question surprenante que l’on se pose après avoir visité l’exposition « Peter Klasen, mémoire du regard, œuvre photographique » au LAAC de Dunkerque. La ville a invité l’artiste en résidence en 2008 et en 2009 pour qu’il réalise de nouvelles photographies du port dix ans après sa première venue. Ces images se confrontent à celles réalisées à La Havane et à Los Angeles, elles aussi villes portuaires.
Klasen s’intéresse à l’industrie, à la machine et particulièrement aux rouages de celle-ci. Vannes, tuyaux, volants, tableaux de bord, cadenas, verrous abondent tout au long de l’exposition. L’artiste réalise des gros plans, il s’approche au plus près des appareils comme pour mieux saisir leur fonctionnement, leur intensité mais aussi leur poésie. L’industrie est fragmentée et c’est à nous de recréer cet univers dans sa globalité. Notre œil s’attarde enfin sur ces zones industrielles souvent dédaignées. Les formes nous surprennent une fois sorties de leur contexte. Elles interagissent entre elles et forment parfois des visages, des clowns ou autres curiosités… Première victoire de l’imaginaire sur la machine.
Victoire de la nature sur les machines également. Rares sont les appareils luisants et propres (hormis cette incroyable usine Lesieur étincelante de toute part). Au contraire, le temps et le climat ont laissé leurs traces. La pluie, le soleil, les années ont rouillé, abimé, cabossé, souillé les machines. C’est l’expression même du temps que nous donne à voir Peter Klasen. Ce temps qui semble s’être suspendu à La Havane où tout est abandonné, usé... Au contraire, Dunkerque, ville à la réputation fade et terne, semble peu à peu reprendre vie sous nos yeux. Klasen réattribue des couleurs (le rouge, le jaune, le bleu) à la ville et s’attarde avec un certain lyrisme sur ses formes, ses figures et ses contours. Mais cette renaissance ne se fait pas sans danger. L’insécurité rôde. Les usines gigantesques sont inquiétantes, les monts d’aluminium tranchants… On grillage les lieux comme à Los Angeles. Et les pictogrammes nous avertissent d’un danger indéfini. On s’aperçoit que les menaces n’ont pas changé malgré les années.
L’exposition ne cesse de nous rappeler que les instants passent. Ce temps c’est aussi la mémoire et ses aléas. Le titre « mémoire du regard » évoque la photographie comme document enregistrant les états éphémères des choses. Mais aussi la mémoire de Klasen qui revient à Dunkerque, redécouvre les lieux et rephotographie. Il met donc à son tour ses souvenirs à l’épreuve particulièrement dans les impressionnants photomontages nommées Lost Landscape. Ces « Paysages perdus» sont de véritables métaphores de la mémoire où les images s’effacent, persistent, se juxtaposent, se dérobent, se dupliquent… L’œuvre n° 9 est composée de 12 photographies de Dunkerque prises en 2009 ou 2008. Au centre, Klasen peint le visage d’une femme bleue. Cette figure est récurrente dans son travail mais elle surprend par sa présence dans cet univers d’aluminium, de rails, de grues… Quel peut bien être le lien entre une femme fantasmatique et érotique à souhait et ce monde masculin où la machine règne en maître ? Il s’agit sans aucun doute de leur beauté froide. Ces métaux luisants, cette femme sensuelle, ce rouge agressif sont attirants mais sans vie. L’homme n’a pas sa place dans cet univers, il ne peut pas atteindre cette femme et ne peut pas se déplacer dans cet espace anarchique.
Nous touchons alors de près à une des questions fondamentales de l’exposition : l’homme peut il réellement se dévoiler, se construire face à ces machines imposantes? Chez Klasen, l’être humain est invisible. Les photographes William Eggleston et Jürgen Nefzger, eux aussi invités en résidence à Dunkerque, ont accordé une grande place à l’homme à travers leurs travaux. Klasen choisit de cacher l’individu pour mieux révéler son enfermement. L’homme plane comme une ombre sur ces ports, il en est le fondateur mais se retrouve dépassé par le gigantisme des machines.
La photographie semble être le moyen de s’approprier ce réel, de faire enfin sien ces appareils qui nous transcendent par leur possibilités. Nous n’avons aucune prise sur cette réalité et la photographie se fait suppléante pour ne pas oublier mais surtout pour apprivoiser. Klasen avec cette exposition laissera à coup sur une empreinte sur chacun de nous. Il nous offre un Dunkerque imaginaire auquel on confronte nos propres images qu’elles soient mentales ou photographiques…
Klasen s’intéresse à l’industrie, à la machine et particulièrement aux rouages de celle-ci. Vannes, tuyaux, volants, tableaux de bord, cadenas, verrous abondent tout au long de l’exposition. L’artiste réalise des gros plans, il s’approche au plus près des appareils comme pour mieux saisir leur fonctionnement, leur intensité mais aussi leur poésie. L’industrie est fragmentée et c’est à nous de recréer cet univers dans sa globalité. Notre œil s’attarde enfin sur ces zones industrielles souvent dédaignées. Les formes nous surprennent une fois sorties de leur contexte. Elles interagissent entre elles et forment parfois des visages, des clowns ou autres curiosités… Première victoire de l’imaginaire sur la machine.
Victoire de la nature sur les machines également. Rares sont les appareils luisants et propres (hormis cette incroyable usine Lesieur étincelante de toute part). Au contraire, le temps et le climat ont laissé leurs traces. La pluie, le soleil, les années ont rouillé, abimé, cabossé, souillé les machines. C’est l’expression même du temps que nous donne à voir Peter Klasen. Ce temps qui semble s’être suspendu à La Havane où tout est abandonné, usé... Au contraire, Dunkerque, ville à la réputation fade et terne, semble peu à peu reprendre vie sous nos yeux. Klasen réattribue des couleurs (le rouge, le jaune, le bleu) à la ville et s’attarde avec un certain lyrisme sur ses formes, ses figures et ses contours. Mais cette renaissance ne se fait pas sans danger. L’insécurité rôde. Les usines gigantesques sont inquiétantes, les monts d’aluminium tranchants… On grillage les lieux comme à Los Angeles. Et les pictogrammes nous avertissent d’un danger indéfini. On s’aperçoit que les menaces n’ont pas changé malgré les années.
L’exposition ne cesse de nous rappeler que les instants passent. Ce temps c’est aussi la mémoire et ses aléas. Le titre « mémoire du regard » évoque la photographie comme document enregistrant les états éphémères des choses. Mais aussi la mémoire de Klasen qui revient à Dunkerque, redécouvre les lieux et rephotographie. Il met donc à son tour ses souvenirs à l’épreuve particulièrement dans les impressionnants photomontages nommées Lost Landscape. Ces « Paysages perdus» sont de véritables métaphores de la mémoire où les images s’effacent, persistent, se juxtaposent, se dérobent, se dupliquent… L’œuvre n° 9 est composée de 12 photographies de Dunkerque prises en 2009 ou 2008. Au centre, Klasen peint le visage d’une femme bleue. Cette figure est récurrente dans son travail mais elle surprend par sa présence dans cet univers d’aluminium, de rails, de grues… Quel peut bien être le lien entre une femme fantasmatique et érotique à souhait et ce monde masculin où la machine règne en maître ? Il s’agit sans aucun doute de leur beauté froide. Ces métaux luisants, cette femme sensuelle, ce rouge agressif sont attirants mais sans vie. L’homme n’a pas sa place dans cet univers, il ne peut pas atteindre cette femme et ne peut pas se déplacer dans cet espace anarchique.
Nous touchons alors de près à une des questions fondamentales de l’exposition : l’homme peut il réellement se dévoiler, se construire face à ces machines imposantes? Chez Klasen, l’être humain est invisible. Les photographes William Eggleston et Jürgen Nefzger, eux aussi invités en résidence à Dunkerque, ont accordé une grande place à l’homme à travers leurs travaux. Klasen choisit de cacher l’individu pour mieux révéler son enfermement. L’homme plane comme une ombre sur ces ports, il en est le fondateur mais se retrouve dépassé par le gigantisme des machines.
La photographie semble être le moyen de s’approprier ce réel, de faire enfin sien ces appareils qui nous transcendent par leur possibilités. Nous n’avons aucune prise sur cette réalité et la photographie se fait suppléante pour ne pas oublier mais surtout pour apprivoiser. Klasen avec cette exposition laissera à coup sur une empreinte sur chacun de nous. Il nous offre un Dunkerque imaginaire auquel on confronte nos propres images qu’elles soient mentales ou photographiques…
Sarah VIDAL, AS3
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